Selon certains documents d’évaluation municipale, les premiers groupes de colons à s’établir dans le canton de Cambridge étaient principalement des familles écossaises et anglo-saxonnes. Vers les années 1850, on note l’arrivée de familles canadiennes-françaises dans la région.
Dès 1804, certains terrains à St-Albert (et ses environs) furent attribués à au moins une douzaine de Loyalistes de l’Empire-Uni, soit des loyalistes américains qui s’étaient installés en Amérique du Nord britannique pendant ou après la Révolution américaine. Cependant, ces propriétaires ne se sont jamais installés à St-Albert, préférant rester plus au sud, le long des rives du fleuve Saint-Laurent.
Entre 1840 et 1850, un groupe d’immigrants plus considérable s’est rendu à St-Albert. Ils étaient, pour la plupart, d’origine écossaise et portaient des noms de famille tels que McRae, McKinnon, Ferguson, Campbell et Cameron. Une centaine de colons se sont installés ici en 1842. Les six ou sept premières familles canadiennes-françaises arrivèrent à St-Albert en 1851 et furent répertoriées au recensement de cette année-là.
Les chiffres du recensement décennal de 1851 indiquent qu’il y a déjà un groupe de six ou sept familles canadiennes-françaises dans la future paroisse de St-Albert.
Le recensement général de 1861 nous donne les premiers chiffres exacts sur le nombre de colons alors établis dans les VIIᵉ, VIIIᵉ, IXᵉ et Xᵉ concessions.
En 1861, il y avait 369 âmes dans ces quatre concessions. Parmi les familles canadiennes françaises qui s’y trouvent, on relève les noms de Génier, Labelle, Chartrand, Allaire, Carrière, Turpin, Lafrance, Lapensée, Bouchard, Payette, Clément, Papineau, Godard, Pilon, Gibault, Quesnel, Arbique et Potvin.
Les premiers colons s’établirent sur l’extrémité sud des lots de la Xe concession et prirent l’habitude de dire qu’ils demeuraient «sur la dix» (entendons : la dixième concession). Bientôt, ce nom fut donné à la route ouverte plus tard sur l’extrémité sud de cette concession. Poussant plus à l’intérieur, d’autres colons s’établirent sur l’extrémité sud de la IXe concession, et la route qui passait à leur porte s’appelait «la neuf». Les habitants de la VIlle concession, établis au sud de celle-ci, occupaient «la huit», et ainsi de suite. C’est l’appellation encore en usage de nos jours.
Or, imitant le curé d’Embrun, M. Adrien Gauthier – curé de St-Albert de 1885 à 1898 – proposa un nom pour chacun des rangs. Mais, contrairement aux gens d’Embrun, les paroissiens de St-Albert n’ont pas adopté cette appellation commode. Qu’il soit permis de ressusciter ces noms et de nous en servir dans ce travail. On ignore si M. Gauthier avait donné un nom à la route-frontière entre les cantons de Cambridge et de Finch. La route entre les IXe et Xe concessions avait reçu le nom de Rang St-Albert : St-Albert-est et St-Albert-ouest selon qu’il s’agit de la section à l’est ou de la section à l’ouest de la rivière Nation. La route entre les VIlle et la IXe concessions s’appelait Rang St-Adrien, est et ouest; et la route entre les VIle et VIlle concessions à l’ouest de la Nation fut nommée Rang St-Théophile par le curé d’Embrun.
L’extrémité ouest de ce rang se trouve en effet dans la paroisse d’Embrun et le curé de St-Albert n’a fait qu’adopter le nom déjà choisi par le curé de la paroisse voisine. La route du Rang St-Albert-est et la montée qui va du village vers Crysler auraient été ouvertes entre 1870 et 1875; la route du Rang St-Adrien-est et la montée qui va de celle-ci au village de St-Albert l’auraient été vers 1878. On placerait vers 1888 l’ouverture du Rang St-Adrien-ouest qui couvrait alors une distance d’environ un mille. C’est à la même époque qu’aurait été ouverte la première montée qui traverse la IXe concession à l’ouest de la Nation.
La section du Rang St-Albert-ouest comprise entre la montée susmentionnée et la deuxième montée plus à l’ouest tarda à être ouverte à cause de la nature marécageuse du sol. Ce n’est qu’après la construction du premier pont de bois sur la Nation en 1881 que cette route sera ouverte complètement, sur les instances de M. le curé Philion, par M. Joseph Pagé, alors conseiller municipal.
Le premier moyen de communication entre les deux rives fut un bac qu’on y installa vers les 1875. Il devait exister jusqu’à la construction du premier pont, soit cinq ou six années plus tard. L’arrivée du premier curé, qui allait donner une formidable poussée au développement de St-Albert, devait provoquer la disparition de ce bac et des scènes idylliques.
En 1873, d’autres noms de famille sont notés: Blondin, Legault dit Deslauriers, Laflèche, Dupuit, Benoît, Sanche, Renaud, Rainville, Meilleur, Lamoureux, Pagé, Clément, Beauchamp, Brunet et Lebrun. La plupart de ces colons franco-canadiens sont originaires d’Embrun, dans le Canada-ouest (aujourd’hui en Ontario) et de St-Jacques-de-l’Achigan, St-Augustin, St-Jérôme, St-Hermas, Laprairie et Ste-Scholastique dans le Canada-est (province actuelle du Québec).
Roger Cayer, St-Albert, 125 ans de vie, 1999, Pages 4 à 9