Bâtir une école au coeur du village

Écoles du village de St-Albert

Pour suivre l’actualisation de l’activité scolaire à Saint-Albert, il faut d’abord suivre le cheminement de l’école française à travers le système ontarien: c’est effectivement en 1786 que la première école de l’Ontario a vu le jour, c’était une école française située à Windsor. En 1912, le règlement 17 interdit l’enseignement du français dans nos écoles. Les Franco-Ontariens organisent la résistance. C’est la «bataille des épingles à chapeaux» où les femmes occupent jour et nuit l’école Guigues à Ottawa. Partout, c’est la crise scolaire en Ontario.

À St-Albert, lorsque l’inspecteur anglais se pointe à l’école, tous se précipitent dehors par les portes ou les fenêtres. La loi ne permettait pas de cours de religion; aussi, fallait-il cacher le catéchisme. On permettait une heure de français par jour mais la pratique était tout autre à St-Albert. Un jour, l’inspecteur anglais voulait décrocher le crucifix d’une classe. Comme tous étaient sur le pied de guerre, quelqu’un courut avertir le commissaire d’école qui était aussi le forgeron du village aux biceps éloquents, celui-ci se présente aussitôt : «Touche pas à ça et sors tout de suite de l’école», ont été les seules paroles prononcées par le forgeron-commissaire. L’intrus s’est faufilé avec sa petite valise entre deux rangées imposantes d’élèves déjà dehors pour protester. C’est finalement en 1927 que l ‘Ontario retire son Règlement 17.

Les premières écoles de la paroisse furent des écoles fréquentées lors de leur fondation, surtout par des protestants. Les deux premières furent l’école No 3 à Mayerville, sur le lot 8 de la Xe concession, et l’école No 6 presqu’à l’autre bout de la même concession, sur le lot 26. Elles furent ouvertes le 2 novembre 1857. Elles étaient installées dans des endroits peuplés d’Anglo-Saxons. La troisième, l’école publique No 7 sera ouverte le 28 janvier 1867, sur le lot 15 de la Xe concession. Cette dernière, située dans la plaine, si on peut dire, fut apparemment fréquentée dès le début surtout par des petits Canadiens français. Le manque d’écoles au début de la colonie du canton de Cambridge, le manque de vêtements nécessaires aux enfants pendant les mois d’hiver lorsque ces écoles existèrent, puis l’indifférence d’un grand nombre en matière d’instruction firent se perpétuer pendant plusieurs années un état d’analphabétisme assez général chez les anciens: trop souvent on trouve des croix plutôt que des signatures au bas des documents officiels. Cependant, dès la période de 1885-1890 on relève un engouement plus prononcé pour l’instruction, alors qu’un nombre plutôt élevé de jeunes gens fréquentent même des institutions d’enseignement secondaire à l’extérieur.  

En 1885 l’école du village est bâtie à l’endroit où elle est encore aujourd’hui. Le terrain appartenait à la fabrique, et il est vendu à la section d’école séparée catholique No 6-7.  Trois ans après la fondation de l’école du village, on manifeste le désir de s’assurer les services de religieuses pour l’enseignement. M. le curé Gauthier écrit à l’évêque d’Ottawa, le 4 juin 1886, que «les syndics de l’école du village de St-Albert désirent engager, si Votre Grandeur n’a pas d’objection, deux religieuses pour l’enseignement de leurs enfants». Le 13 septembre 1887 il écrit de nouveau: «J’ai en main 300$ pour mon futur couvent.» Et l’affaire reste pendant des années à l’état de projet. Enfin, en 1913, on franchit un pas important en faisant l’acquisition de la maison de M. Alexandre Plante pour loger des sœurs enseignantes. La transaction est conclue sous M. le curé Arnault. Puis, en 1915, sous l’égide de M. le curé V. Pilon, le projet est enfin réalisé et on salue l’arrivée des Sœurs du Sacré-Coeur. Les trois écoles publiques qui existaient lors de la fondation de la paroisse seront graduellement remplacées par des écoles séparées, tandis que d’autres écoles séparées seront ouvertes pour répondre aux besoins croissants de la population. 

En 1949, il fut proposé par Lucien Adam et appuyé à l’unanimité que le secrétaire fasse demande à l’inspecteur pour des plans appropriés en vue de bâtir une école convenable pour l’arrondissement scolaire. En 1950, on agrandit la cour d’école d’après les exigences. Le 25 août, la vieille école fut vendue à Narcisse Demers pour 450$. Donat Legault fut nommé contre-maître pour la construction de la nouvelle école. On achète une machine à écrire. On loua une maison d’Alphonse Adam à vingt dollars par mois, pour les besoins d’une classe 7e,8e, 9e et 10e, durant la construction. 

Le 21 avril 1951, on entrait dans l’école neuve: 4 classes, plafonds acoustiques, éviers, tableaux de verre, au coût de 60 000$ pour recevoir une centaine d’élèves, du jardin d’enfants à la 10e année. Le 21 octobre 1951 avait lieu la bénédiction de l’école par Son Excellence Mgr Maxime Tessier.

Vers les années ’50 débuta le mouvement de centralisation. On regroupe les écoles sous une seule unité administrative par village. C’est ce qui amène la disparition des écoles de rang où une seule personne enseignait les huit années du cours élémentaire dans une seule salle de classe, et cela, à quelque 30, 40 ou 50 élèves. Cet exode de nos écoles rurales s’échelonne sur une période de 12 ans et se produit ainsi à St-Albert. 

S’unissent donc à l’école du village: 

l’école #3 de la 8e concession est, en septembre 1956, 

l’école #6B de la 9e concession ouest, en septembre 1960, 

l’école #15 de la 7e concession ouest, en septembre 1961 

l’école #14 de Mayerville (9e concession est), en septembre 1968. 

À partir de 1965, l’enseignement n’est plus offert aux élèves de 9e et 10e année. En 1967, on ajoute une autre salle de classe, un gymnase et une bibliothèque.

C’est en janvier 1969 qu’arrive le grand bouleversement en éducation. On groupe les écoles sous une seule administration centrale par comtés unis. Ainsi, nous devenons sous la juridiction du Conseil des écoles séparées catholiques des comtés de Prescott-Russell, dont les bureaux administratifs sont situés à Hawkesbury. Le conseil scolaire est composé de dix membres élus dont M. Jacques Landry est notre conseiller régional.

En 1997, on assiste à la création des conseils scolaires de langue française en Ontario. L’école élémentaire catholique St-Albert est rattachée au CSDCEO (Conseil scolaire de district catholique de l’Est ontarien). En 1999, à l’occasion du 125e anniversaire de St-Albert, 221 élèves fréquentent l’école.

En 2024, l’école accueille maintenant une centaine d’élèves. C’est dans un climat familial d’entraide que le personnel de l’école œuvre auprès des enfants de la communauté afin qu’ils cheminent en tant qu’apprenants et citoyens éco responsables. Un service de garde pour les bambins et les préscolaires y est offert, tout comme un service de garde avant et après l’école.

 Roger Cayer, St-Albert, 125 ans de vie, 1999, p.91 à 135